Long de 250 pieds (env. 76 m), sans pilote, il doit voler, à 20 000 pieds (6000 m), trois semaines sans ravitaillement en carburant. Source : http://gizmodo.com
- Le programme Maîtrise de l’énergie est constitué à ce jour d’un atelier-club dirigé par Jean-Louis Bobin
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Rappel du texte fondateur de Prospective 2100 pour ce programme séculaire mondial
La maîtrise de l’énergie est cohérente avec le nouveau système technique. Elle utilise les ressources de manière plus fine et précise. Mais il faut l’accélérer par l’intervention d’agences, alimentées par des taxes sur les consommations d’énergie, et utilisant le produit de ces taxes pour promouvoir les nouvelles technologies plus « soutenables ».
Par exemple, celles de la « civilisation de l’hydrogène » : le remplacement des combustibles par l’hydrogène évite l’effet de serre. Il ne produit que quelques nuages de plus en brûlant. Il n’est pas polluant. On peut l’obtenir à partir de n’importe quelle source d’électricité (solaire, éolienne, nucléaire…). Quelques aménagements (sécurité, corrosion…) suffisent pour que les moteurs et les brûleurs actuels puissent l’accepter. Il faut donc, dans tous les pays, aménager un passage graduel au combustible hydrogène, en même temps qu’un développement massif de l’électrification et des énergies nouvelles (solaire, éolienne, biomasse…), ainsi que des économies d’énergie.
La question de l’approvisionnement en énergie a mobilisé la prospective dès les années 70. Elle a été présentée de manière catastrophiste. L’espèce humaine consomme en moyenne chaque année vingt cinq fois son propre poids de pétrole, charbon et gaz. Or, ces matières sont le résultat de la décomposition de cadavres de plantes et d’animaux qui vivaient pour la plupart il y a plusieurs centaines de millions d’années. Elles ne représentent qu’une petite fraction des matières vivantes du passé. L’essentiel a été recyclée par l’écosystème, a brûlé, s’est dilué ou évaporé. Ce qui reste pour la consommation énergétique est en quantité limitée. Les réserves reconnues de pétrole sont d’une quarantaine d’années de consommation ; elles montent jusqu’à deux cents ans si l’on y ajoute les “nouveaux pétroles” et une estimation raisonnable des gisements qui restent à découvrir. Celles du charbon sont plus importantes, mais ne vont pas au delà de trois à quatre cents ans, ce qui est bien peu au regard de l’évolution de l’Espèce.
Au 21ème siècle, la mondialisation rapproche les niveaux de consommation d’énergie des différents peuples de la planète. Nous consommons actuellement 1,4 tonnes d’équivalent pétrole par habitant et par an sur l’ensemble du globe (c’est à dire 25 fois le poids d’un humain moyen de 56 Kg). Mais certains pays (les USA, la Russie et l’Australie) en consomment respectivement 7, 4,7 et 4,8 tonnes, alors que les plus pauvres n’en utilisent que 0,1, soit cinquante fois moins. Sans doute, les besoins ne sont pas les mêmes partout. Il est moins nécessaire de chauffer dans les pays tropicaux et les distances sont moins grandes dans les régions denses. Cependant, à Washington, les pointes de consommation ne se situent pas en hiver, comme en Europe, mais en été, à cause des climatiseurs. Et en Russie, le niveau très élevé de la consommation moyenne n’est pas dû au niveau de vie, mais au contraire à la mauvaise qualité des installations : les fours industriels sont mal isolés, les bâtiments aussi. De véritables passoires thermiques envoient dans l’atmosphère la plus grande partie de l’énergie consommée.
Confort excessif et avachissement de la population d’un côté, gaspillage et ingéniérie déficiente de l’autre. On ne peut pas dire que ce soient des “besoins”. C’est un état de la technique et des moeurs, imparfait et irresponsable, qui ne demande qu’à être amélioré. Tel est l’objet de ce programme. Cependant, il ne faut pas oublier que les pays pauvres ont, dans le 21ème siècle, un rattrapage économique à effectuer. Et, même s’il ne tombent pas dans les excès des pays riches, il leur faudra quand même consommer plus d’énergie. La mondialisation des communications devrait avoir pour conséquence l’harmonisation des niveaux de vie, tout en accentuant une diversité des modes de vie. Chacun pouvant voir aisément où en sont les autres peuples voudra en effet accéder aux mêmes types de possibilités. Dans un premier temps, les pauvres ne le pourront pas. Mais, au bout de deux ou trois générations, le fossé sera comblé. Aucun dirigeant, le plus rétrograde soit-il, ne peut empêcher le désir profond du peuple de se réaliser à long terme. Il peut seulement retarder -ou accélérer- l’évolution.
Dès avant les “chocs” pétroliers, des cris d’alarme ont été poussés à propos de l’énergie. Mais le “Halte à la croissance”, reniant l’économie tout entière, aurait dû se limiter à un “halte à la surconsommation”. Depuis, il est apparu que la combustion du pétrole et du charbon présentaient aussi un inconvénient imprévu : elles accroissent la teneur en gaz carbonique de l’atmosphère. Le rayonnement solaire est alors piégé, et la terre se réchauffe. Si nous continuons sur notre lancée, dans cinquante ans la proportion de CO2 aura doublé. Par “effet de serre”, le climat sera plus chaud de trois degrés en moyenne : un degré près de l’équateur, et dix près des cercles polaires, ce qui fera monter le niveau des mers, par dilatation des océans et fonte des glaciers, mais rendra aussi peut être plus hospitalières certaines régions froides (Canada, Islande, Scandinavie, Sibérie). Une telle augmentation est peut-être tolérable, encore que la rapidité du changement et ses conséquences prévisibles n’aient pas encore été analysés avec suffisamment de précision. Néanmoins, il est clair que ces accroissements de température provoqueront des sécheresses telles que des peuples entiers seront contraints de migrer vers les régions du nord devenues plus habitables, qu’il faudrait alors équiper pour les accueillir. En première approximation, pour un accroissement de l’ordre de 3 degrés, on estime que ce flux de migrants se compterait en centaines de millions. Une élévation de température nettement supérieure provoquerait sans doute des déséquilibres écologiques et climatiques à caractère catastrophique. C’est pourquoi les énergéticiens estiment maintenant que les consommations, au 21ème siècle, ne seront pas restreintes par le manque de ressources, mais par la nécessité de contenir l’effet de serre dans des limites non dangereuses. Par ailleurs, dans certains pays en développement, la consommation de bois de feu accélère le processus de désertification. Les pluies acides, les marées noires et la pollution atmosphérique des villes, dues pour l’essentiel à l’énergie, menacent la santé des humains et de la Nature. D’ici une cinquantaine d’années, nous risquons une “apocalypse au ralenti” : désertification, instabilité climatique, montée des eaux océaniques…
Depuis la seconde guerre mondiale, pendant laquelle le pétrole (en fait les carburants, souvenons nous des gazogènes) est apparu comme une ressource stratégique, les techniciens ont oscillé entre la recherche de sources miracles, capables de résoudre tous les problèmes à la fois (l’hydraulique, puis le nucléaire, et peut être la fusion), et d’autre part l’envie de se libérer de l’emprise dominatrice d’une source particulière (le charbon, puis le pétrole). Cette double et contradictoire préoccupation s’accompagnait d’une manière désinvolte de tenir le public hors de leurs décisions, au motif qu’on n’avait pas le temps ni les moyens de lui expliquer des choses compliquées, que les spécialistes eux-mêmes avaient parfois du mal à comprendre. Les technocrates s’étaient convaincus que le peuple se comporte de manière bestiale, et préfère toujours la satisfaction de besoins immédiats à la sécurité à long terme. Pressés de mettre en place le nucléaire, ils l’ont fait en tirant les prix (pour être compétitif avec le pétrole), au détriment de la sécurité. Les centrales nucléaires auraient dû être enterrées profondément, et beaucoup plus robotisées. Elles le seront peut-être dans la seconde moitié du 21ème siècle…
Il n’y aura sans doute pas de source miracle, mais on trouvera dans la diversité des approvisionnements la sécurité tant recherchée. Ni la fusion contrôlée, ni les surrégénérateurs, ni le solaire, ni les éoliennes, ni l’énergie de la houle, ni l’énergie thermique des mers, ni la biomasse n’auront de monopole, mais toutes contribueront, chacune selon ses possibilités, à la production mondiale d’énergie. Le paysage énergétique futur laissera moins de place à la confiscation des ressources et des marchés.
Toutefois, trois questions nécessiteront des actions collectives volontaristes de grande ampleur :
-la première est l’électrification du monde. La mise en réseau de la planète, pour l’électricité comme pour le téléphone, est sans doute dans la logique profonde du nouveau système technique. Elle est inévitable à long terme. Mais son financement ne va pas de soi pour les régions pauvres ou éloignés des centres de production. Des solutions alternatives existent pour celles qui développeront des productions locales et des petits réseaux alimentés par des énergies renouvelables. Mais si la mise en réseau n’est pas faite, l’exclusion ne pourra que s’accentuer, produisant des révoltes et des désordres bien plus coûteux que le raccordement, en argent et surtout en valeurs humaines. Le programme, sur ce sujet, construira des instruments de financement spécifiques, permettant d’amortir les investissements dans les zones mal desservies.
-la seconde est l’économie d’énergie, grâce surtout à une utilisation plus efficace jointe à la lutte contre les gaspillages. L’expérience montre qu’un niveau, même élevé, de prix ne suffit pas pour que les investissements économisant l’énergie soient effectués par les usagers. Certains subissent les augmentations comme une fatalité, sans réagir. Pour d’autres, la facture énergétique représente une fraction faible de leurs coûts, à laquelle ils n’ont pas le temps de s’intéresser. Il faut donc renforcer l’incitation financière, et mener des campagnes pour faire mieux connaître aux industriels et aux particuliers les vertus de l’économie d’énergie. Le programme, là aussi, consiste à bâtir des financements appropriés, sous forme de redevances, d’un réseau d’agences pour la maîtrise de l’énergie, et de programmes internationaux de développement des énergies renouvelables.
-la troisième est le passage à une “civilisation de l’hydrogène”. Techniquement, les avantages sont manifestes : le remplacement des carburants par l’hydrogène évite d’augmenter l’effet de serre. Plus d’excédent de gaz carbonique, il ne produit que de la vapeur d’eau en brûlant : quelques nuages de plus… Il n’est pas polluant : plus de fumées nocives, finis les gaz d’échappement délétères et les pluies acides qui rongent les forêts. On peut l’obtenir à partir de n’importe quelle source d’électricité (solaire, éolienne, nucléaire…). L’hydrogène n’est pas une énergie primaire, c’est ce qu’on appelle un “vecteur énergétique”, c’est à dire un moyen de stocker et transmettre l’énergie. Il faudra donc d’abord développer la production d’hydrogène à partir des énergies renouvelables, pour éviter de déplacer les problèmes de pollution et de surconsommation vers l’amont. Quant aux usages, quelques aménagements, déjà connus des techniciens (sécurité, corrosion…) suffisent pour que les moteurs d’automobile et les brûleurs actuels puissent l’accepter. Mais si l’on veut, dans tous les pays, effectuer un passage graduel à ce nouveau combustible, il faut changer des filières techniques entières, ce qui suppose des financements considérables et une programmation prévoyante. Comment, en effet, organiser un réseau hydrogène remplaçant les pompes à essence ? Doit-on remplacer le gaz de ville (actuellement du méthane) par de l’hydrogène, beaucoup plus volatil, se faufilant à travers la moindre micro fissure et susceptible d’exploser s’il se trouve mélangé à de l’air dans certaines proportions ? Comment dompter ce dragon, l’élément le plus léger de la chimie, et le plus actif aussi ? Ce n’est pas impossible. Des distributions d’hydrogène dans des réseaux publics de gaz sont déjà en service depuis des décennies dans plusieurs villes d’Europe. On utilise déjà l’hydrogène comme combustible dans les fusées spatiales, et l’on sait que, prochainement, les conditions de sécurité seront suffisamment maîtrisées pour pouvoir remplacer par de l’hydrogène le kérosène des avions de ligne. Ce sera sans doute, avec les utilisations diverses de l’industrie, le premier débouché massif. Le remplacement de l’essence et du fuel des transports routiers suivra, quand les constructeurs automobiles et les distributeurs pétroliers auront fait le nécessaire. On disposera d’une programmation cohérente d’un passage global à l’hydrogène, avec toutes ses variantes d’usage (chauffage, moteurs, industrie…), de production et de distribution, quand les négociations avec ces lobbies auront abouti à des échéanciers clairs, et tranché quelques points délicats, tels que les niveaux de prix et les conditions du démembrement des oligopoles. Doit-on, par exemple, envisager que chacun se produira son hydrogène avec un petit électrolyseur domestique, ou bien que les grandes compagnies pétrolières se convertiront, le moment venu, à la distribution massive de cette nouvelle forme d’énergie ? Peut-être les deux à la fois, ce serait plus sûr.
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